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Chine: les 5 questions posées par la dévaluation du yuan

  • 7 mars 2016
  • 5 min de lecture

Pour le troisième jour consécutif, la Chine a abaissé le taux de référence du yuan face au dollar. C'est la plus importante dépréciation enregistrée en 20 ans par la monnaie chinoise.

Dévaluation, acte 3. Pour le troisième jour consécutif, la Chine a abaissé de plus de 1% ce jeudi 13 août le taux de référence du yuan face au dollar. Mardi matin, la banque centrale chinoise (PBOC), avait déjà abaissé ce taux de presque 2%, puis d'environ 1,6% mercredi. Il s'agit de la plus brutale dépréciation enregistrée par la monnaie chinoise depuis plus de deux décennies et la mise en place par Pékin du système de changes actuel. Le point sur la situation en 5 questions.

1. Pourquoi la Chine dévalue-t-elle le yuan?

La PBOC a insisté sur sa volonté d'accorder une flexibilité accrue à la monnaie chinoise pour que son niveau reflète davantage les réalités du marché. Il s'agit pour la Chine de rendre sa monnaie plus convertible, un préalable à son internationalisation et à son inclusion dans les Droits de tirage spéciaux (DTS), l'unité de compte du Fonds monétaire international (FMI). Le Fonds, qui doit se prononcer en novembre, avait prévenu que le yuan devait être soumis aux fluctuations du marché et "librement utilisable".

Mais nombre d'observateurs ont surtout vu cette dévaluation comme un puissant effort de Pékin pour relancer une activité économique en plein ralentissement. Les exportations chinoises ont en effet plongé de 8,3% sur un an en juillet et les ventes de voitures neuves ont chuté de 7,1%, soit la pire performance depuis plus de deux ans. A cela, il faut ajouter les 900 milliards de yuans dépensés par Pékin pour éviter un krach boursier en juillet.

Et cette dépréciation du yuan est un coup de pouce bienvenu aux exportateurs, dont les produits seront plus attractifs. La baisse de la monnaie leur permet de vendre plus facilement leur produits et/ou augmentent leurs marges. Leurs produits sont ainsi moins chers que ceux libellés en dollars et cela favorise la "compétitivité prix".

2. Comment fonctionne le marché de change chinois?

La convertibilité du yuan reste étroitement encadrée par Pékin, qui redoute des fuites incontrôlées de capitaux. L'opérateur du marché des changes local et la PBOC sondent quotidiennement un panel d'acteurs de marché, avant de publier chaque matin un taux de référence du yuan face au dollar. Le yuan est autorisé à fluctuer de 2% de part et d'autre de ce taux-pivot durant les échanges, une fourchette élargie par les autorités en mars 2014.

La PBOC tenait habituellement peu compte du niveau de clôture atteint la veille. Sur les quatre derniers mois, le renminbi (autre nom du yuan) avait oscillé dans une fourchette d'à peine 0,4%, malgré des pressions à la baisse. Désormais, le taux-pivot reflétera la clôture de la veille, l'offre et la demande sur le marché et les fluctuations des grandes devises étrangères, assure la PBOC.

3. La Chine relance-t-elle la guerre des monnaies?

Avec cette importante dévaluation la Chine fait resurgir le spectre de la guerre des changes, bien qu'elle s'en défende. Ma Jun, chef de la recherche de la banque centrale chinoise, a précisé mardi, que la dépréciation revenait uniquement à un ajustement entre la parité administrative et l’évolution du yuan sur le marché interbancaire. "Permettre à cette devise de s’affaiblir sensiblement face au dollar ne signifie pas le commencement d’une tendance à la baisse", a-t-elle justifié auprès de l’agence officielle, Chine Nouvelle.

L'agence de notation financière Standard and Poor's a elle aussi appuyé cette idée. Dans une note mercredi, S&P estime que "la décision surprise de la Chine d'autoriser davantage de flexibilité à son taux de change est tout à fait sensée économiquement et ne s'apparente pas au début d'une guerre des devises ni à une tentative de relancer la croissance". Même, le président de la Réserve fédérale de New York, William Dudley, a considéré que la dévaluation de la monnaie chinoise paraissait "économiquement justifiée".

En dévaluant sa monnaie, la banque centrale chinoise répond également aux politiques de rachat massif d'actifs engagés depuis plusieurs années par la Fed et depuis quelques mois par la Banque centrale européenne. Des politiques qui ont permis aux États-Unis et à la zone euro de fortement déprécier leur monnaie. Entre mars 2014 et mars 2015, l'euro a par exemple chuté de 23% face au dollar et au yuan. La Banque du Japon, active en matière de création monétaire, a aussi vu le yen dégringoler de 35% en trois ans. Il n'est donc pas illogique que Pékin réajuste son yuan compte-tenu des politiques monétaires menées par ses concurrents et qui ont contribué à apprécier sa monnaie.

4. Comment ont réagi les marchés financiers?

L'annonce soudaine de la PBOC et l'ampleur de la dévaluation ont pris les marchés par surprise. Les grandes Bourses mondiales ont durement trébuché mardi avant de replonger mercredi, tout comme les marchés de matières premières - sur fond de craintes quant à la demande chinoise -, tandis que le dollar se renforçait.

Mercredi, toutes les Bourses européennes ont terminé en forte baisse. Les entreprises exposées à la Chine étaient comme la veille les plus sanctionnées. L'indice CAC 40 de la Bourse de Paris a fini sur une chute de 3,40%, le secteur automobile subissant une forte pression, à l'image de Renault (-3,87% à 81,56 euros), PSA Peugeot Citroën (-4,94% à 16,83 euros) ou Valeo (-4,60% à 115,15 euros). A la Bourse de Francfort, l'indice Dax avait lui dégringolé de 3,27%.

Toutefois, la situation semblait quelque peu se calmer jeudi matin, la Bourse de Paris en progrès, gagnait brièvement 2% et reprenait une partie du terrain perdu depuis deux jours.

Il faut aussi signaler, que les matières premières ont particulièrement souffert de cette dévaluation du yuan, car elles deviennent ainsi plus onéreuses pour la Chine, gros consommateur de ressources mondiales. Les cours du pétrole ont par exemple chuté mardi à New York à leur plus bas niveau depuis plus de six ans.

5. Quels vont être les effets de cette dévaluation ?

Le principal effet positif comme on l'a rappelé est de favoriser les exportations qui devraient tirer profit de cette dévaluation. Mais celle-ci aboutira aussi à un gonflement des dettes en dollars des entreprises chinoises.

L'inflation dans le pays risque par ailleurs de grimper, avec le renchérissement du coût des importations, libellées en devises étrangères. Les flux de capitaux hors du pays, de la part d'investisseurs inquiets de voir fondre la valeur de leurs actifs, pourraient également s'accélérer. Selon Tom Orlik, du cabinet Bloomberg Intelligence, une dépréciation de 1% du taux de change réel du renminbi pourrait doper de 1 point de pourcentage la croissance des exportations chinoises, mais faire s'envoler l'équivalent de 40 milliards de dollars de capitaux.

Aux Etats-Unis, dont les exportations risquent d'être pénalisées, la Réserve fédérale (Fed) pourrait retarder encore davantage la remontée de ses taux d'intérêt.

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